On estime qu’une entrepreneure sur trois est aussi une mère. Pour beaucoup de femmes, c’est un besoin de flexibilité qui les a poussées vers l’entrepreneuriat. Que se passe-t-il lorsque vient le temps de vendre l’entreprise? Nicole Ewing, directrice, Planification fiscale et successorale, Gestion de patrimoine TD, se joint à Kim Parlee pour partager l’histoire de Mabel’s Labels et pour parler de l’importance de se préparer et de trouver une stratégie de sortie qui vous convient.
C’est la fête des Mères cette fin de semaine. Saviez-vous qu’une femme entrepreneure sur trois est aussi une mère? Souvent, c’est le besoin de flexibilité qui les a poussées vers l’entrepreneuriat. Mais que se passe-t-il quand elles doivent quitter l’entreprise ou la vendre? Julie Cole, de Hamilton, est la fondatrice de Mabel’s Labels en Ontario. Avec le soutien de son équipe, elle a conclu un accord de vente qui lui convenait. Écoutons-la.
Quand Mabel’s Labels a démarré, on fabriquait des étiquettes dans le sous-sol de ma sœur quelques soirs par semaine, de 20 h environ, quand les enfants allaient se coucher, jusqu’à 2 h du matin. Je voulais quitter le monde du travail traditionnel pour avoir un peu plus de flexibilité, et l’entrepreneuriat m’a paru une bonne solution. J’ai discuté avec mes trois cofondatrices, qui se trouvent être ma sœur et deux amies de l’université. Je leur ai dit que le moment était peut-être venu de créer notre entreprise. Elles étaient partantes. Et on n’est jamais revenues en arrière.
Je crois qu’on s’est toujours dit qu’on avait franchi un cap quand la dernière des quatre partenaires a quitté son emploi. On s’est dit, wow, on gagne toutes un salaire suffisant pour ne pas retourner à nos emplois de jour. Pour nous, c’était très marquant.
On a quitté le sous-sol, et on a pris beaucoup d’ampleur. On est maintenant dans des locaux de 14 000 pi². C’est là que se trouvent notre unité de production, où on fabrique nos étiquettes, nos équipes de service clientèle, des TI, des finances et le marketing. On vit toutes près du siège social de Mabel’s Labels. C’est un véritable flot d’étiquettes qui sort de cette porte. Je dirais que nos ventes s’élèvent à 13 ou 14 millions de dollars par an. Cette porte voit passer beaucoup d’étiquettes!
Quand on possède une entreprise, je crois qu’il faut toujours penser à sa stratégie de sortie. Est-ce que vous allez transmettre l’entreprise en héritage à vos enfants, ou est-ce que vous allez vendre? Cela dit, on ne s’était pas vraiment préparées. En fait, une entreprise nous a approchées. Et il s’est trouvé que c’était le bon moment.
On a été contactées par Avery, des géants du secteur de l’étiquette. Ils nous ont proposé de discuter. On s’est dit qu’il n’y avait aucun mal à ça. Ça s’est bien passé. Puis les choses ont évolué à partir de là, et on a conclu une entente avec eux.
Il y a plusieurs choses qui nous ont vraiment aidées. Mettez de l’ordre dans vos affaires, parce qu’une fois que vous avez reçu l’offre, ils vont venir pour le grand déballage et tout passer au crible. La diligence raisonnable va commencer. Ils vont vouloir voir vos contrats. Voir vos chiffres. Ils veulent tout voir.
Il ne faut pas oublier non plus que ces choses peuvent prendre du temps. Et il est possible qu’on vous laisse en plan. Rien n’est sûr tant que l’entente n’est pas conclue.
Je fabrique des étiquettes. Je suis une entrepreneure. Je n’ai pas les connaissances. Je ne suis pas une experte financière.
C’est pour ça qu’il faut faire appel aux experts. Ils vous aideront dans votre planification. Ils vous aideront à mettre de l’ordre. Ils vous aideront – J’ai toujours l’impression que parfois, les entrepreneurs font l’erreur d’essayer de tout faire eux-mêmes. Ils n’ont pas recours à des experts pour les aider. Et ils finissent par perdre de l’argent.
En fin de compte, on a vendu pour 12 millions de dollars. Je suis resté dans l’entreprise. C’était une des conditions : que je reste un an. Souvent, on voudra que vous restiez parce que vous connaissez très bien le secteur et la culture de l’entreprise.
Je suis donc restée un an, tout comme l’une de mes partenaires. Au bout de la première année, tout se passait bien. J’étais très heureuse. Ils étaient contents de moi. Ça cadrait toujours bien. Maintenant, je suis juste une employée de Mabel’s Labels. Et j’adore ça. Je vais y rester jusqu’à la fin de ma carrière.
Comme Julie l’a dit, il y a un risque qu’on vous laisse en plan quand vous vendez une entreprise. Quelqu’un va nous donner des pistes pour éviter ça. J’accueille Nicole Ewing. Elle est directrice de Planification fiscale et successorale à Gestion de patrimoine TD. Nicole, c’est un plaisir de vous avoir avec nous. Tout d’abord, quels sont les grands obstacles à surmonter pour les entrepreneures qui envisagent de vendre leur entreprise?
L’un des obstacles, Kim, c’est simplement l’idée que... On construit en grande partie notre identité autour de ce que l’on fait chaque jour. Quand on bâtit quelque chose d’extraordinaire, comme sa propre entreprise, la perte de cet aspect de notre identité peut sembler effrayante. Et notre entreprise peut faire partie de nos engagements communautaires. Certaines personnes sont très fières des contributions qu’elles apportent à leur communauté. Elles veulent que ça continue de se développer. C’est parfois difficile d’accepter l’idée de transmettre tout cela à quelqu’un d’autre.
Et bien sûr, il y a tout simplement le facteur temps. On sait que les mères sont soumises à des contraintes de temps, rien que pour faire tourner l’entreprise au jour le jour et gérer les obligations familiales. Il faut encore trouver du temps pour bien planifier sa sortie, et cette question risque d’être reléguée au second plan.
Oui. On court toutes après le temps. Absolument. Avez-vous des conseils pour la vente? Puisqu’on parle de temps, quel est le meilleur moment pour planifier la vente?
Le meilleur conseil que je peux donner, c’est d’être prête. Préparez-vous à recevoir cette offre. Planifiez cette vente maintenant. Réfléchissez à ce que vous devez faire pour que si quelqu’un frappe à votre porte, vous soyez prête à répondre à l’appel. Ça veut dire que vos finances sont en ordre. Vous connaissez la valeur de votre entreprise.
Vous pouvez réfléchir à vos acheteurs potentiels et vous renseigner sur ce qui pourrait les intéresser pour maximiser la valeur de votre entreprise. N’attendez pas le moment où vous serez prête à vendre. N’attendez pas le moment où vous aurez besoin de vendre pour prendre votre retraite ou parce qu’une maladie vous frappe.
Assurez-vous d’être prête au cas où une offre se présenterait, et si les conditions changent… On a vu que les conditions changent tout le temps. On doit s’assurer d’être prêtes à optimiser la valeur de notre entreprise. Si on veut vendre demain, il faut qu’on soit prêtes à le faire.
Vous avez parlé du fait qu’il faut choisir un moment en phase avec votre vie personnelle, selon ce qui se passe dans votre vie et s’assurer que ça fonctionne pour tout le monde.
Oui, parce qu’à un moment donné, il se peut que les enfants soient partis à l’université, ou qu’on envisage de prendre soin de nos parents âgés. On voudra peut-être consacrer notre attention à d’autres choses. Il faut donc s’assurer d’être prête et de ne pas attendre le dernier moment, parce que la vente peut prendre un certain temps. Et comme l’a dit Julie, l’acheteur vous demandera peut-être de rester dans l’entreprise un certain temps. Essayez de garder autant de souplesse que possible, tout en restant consciente des événements personnels qui pourraient jouer sur la vente. C’est vraiment l’idéal.
Julie a parlé de la nécessité de s’entourer d’une équipe qui vous aidera à prendre la décision, mais aussi à rationaliser et optimiser cette décision. Elle a souligné que souvent, les entrepreneurs n’aiment pas se reposer sur les autres. Ils veulent tout faire eux-mêmes. Quelle est l’importance d’avoir une équipe, et qui devrait en faire partie?
Je crois que le travail d’équipe, c’est la clé de la réussite. Je suis complètement pour. Je pense qu’on a chacun nos propres spécialités, et quand on réunit toute cette expertise, on obtient inévitablement de meilleurs résultats.
Du point de vue d’un propriétaire d’entreprise, faites appel à des évaluateurs d’entreprise, parlez à un conseiller en succession qui vous aiguillera sur la manière d’accroître la valeur de votre entreprise. Travaillez avec un avocat spécialisé dans l’achat et la vente d’entreprises, qui ne sera pas forcément le conseiller à qui vous faites appel habituellement pour d’autres aspects de votre entreprise. Travaillez avec un comptable fiscaliste qui, là encore, sera en mesure de vous aider à maximiser la valeur après impôt.
Et n’oubliez pas qu’on ne parle pas seulement des conseillers d’affaires, mais aussi des conseillers personnels, comme les planificateurs financiers qui peuvent aider à déterminer comment utiliser le produit de la vente. On doit s’assurer qu’ils seront là pour travailler avec nous dans la prochaine étape de notre vie.
Une autre chose dont Julie a aussi parlé, c’est que ça peut prendre du temps. On ne peut pas claquer des doigts et vendre l’entreprise. Il faut du temps et de la préparation. Il faut du temps pour trouver les bons acheteurs pour l’entreprise. Le processus est parfois très long.
Parfois. Ça peut prendre à peine quelques mois. Ça peut prendre plusieurs années. C’est vrai qu’on a déjà vu – on a parlé du risque qu’on nous laisse en plan. Vous pouvez suivre tout le processus pour qu’au final, ça n’aboutisse pas. Et il faut tout recommencer.
Ça peut être long. Assurez-vous que vos finances sont en règle sur le plan fiscal. Il faut compter au moins deux ans pour s’assurer qu’on se réserve des options aussi souples que possible, pour saisir toutes les occasions d’économiser de l’impôt. Il faut trouver les acheteurs. Je dirais qu’il faut au minimum cinq mois de préparation mentale. Ça peut prendre jusqu’à deux ans.
Et comme on l’a dit, les acheteurs exigent ou souhaitent souvent que vous restiez dans l’entreprise pour les aider pendant la transition, peut-être en formant des employés ou la nouvelle direction s’assurer que l’entreprise reste prospère. Et selon les modalités de l’accord de vente, vous pouvez avoir directement intérêt à ce que l’entreprise continue à se développer et à prospérer. Ça peut faire partie de votre épargne et de votre revenu de retraite.
Alors oui, soyez prêtes. Ça peut arriver demain. Ça peut arriver dans quelques années. Mais soyez aussi flexible que possible dans votre planification, gardez votre équipe autour de vous de sorte que si quelque chose arrive très, très vite, vous ayez les personnes en place pour réagir, mais aussi pour vous aider si le processus prend plus de temps. Peut-être que la vente ira moins vite que prévu, que les conditions changeront, et vous aurez besoin de conseillers à vos côtés pour vous aider à surmonter ces difficultés.
Nicole, c’est toujours un plaisir de vous recevoir. Merci beaucoup.
Ça fait plaisir, Kim.
[MUSIQUE]